Recruter son associé, c’est un peu comme s’engager dans une relation de couple : on vise les projets, la solidité. Que privilégier pour recruter un associé : la complémentarité des compétences ? Ou les valeurs ? Après avoir échangé avec Karim-Franck Khinouche, le choix est pour moi évident.
Novolyze
En 2012, Karim-Franck Khinouche lance son projet de start-up, aujourd’hui baptisée Novolyze. Son idée : révolutionner la sécurité alimentaire en permettant de valider de façon sûre les procédés de décontamination bactérienne. Certes, ça parait un peu compliqué (et… ça l’est). Mais sa technologie innovante mérite vraiment notre intérêt : développer des bactéries non-pathogènes dites « germes modèles » (c’est-à-dire, des « gentilles ») qui miment le comportement des pathogènes (les « méchantes »). Si vous ne comprenez toujours pas, cette vidéo vous l’expliquera mieux que moi.
Depuis 2012, Novolyze est membre de Vitagora, bénéficiant du Pôle pour accroître sa notoriété, notamment à l’international, trouver des partenaires (scientifiques et business), mais aussi – et c’est Karim lui-même qui le dit ! – tirer parti de « l’ouverture d’esprit, la bienveillance et la motivation » de l’équipe du Pôle.
Aujourd’hui mentor d’AcceleRise, ce trentenaire aux ambitions fortes nous livre son expérience sur l’ouverture de son entreprise (qui compte désormais 17 salariés) à des associés.
Valeurs VS Compétences
« Au démarrage d’une start-up, on se focalise sur les aspects opérationnels : dépôt de marque, construction du business model, etc. On ne mesure pas bien les enjeux derrière le choix des associés, » reconnait Karim. « J’ai passé 2 années seul aux commandes de mon projet avant de faire entrer un associé… pour finalement reprendre le guidon en solitaire 2 années plus tard. »
Pour éviter l’incompatibilité entre associés, au risque de déstabiliser sa société sur de nombreuses années, mon conseil est de privilégier un choix de valeurs plutôt qu’un choix de compétences.
En d’autres mots, si notre cher Antoine écrivait qu’« Aimer, c'est regarder ensemble dans la même direction » (amis de la poésie, bonjour), nous pourrions dire la même chose pour « construire une start-up ». Certes, moins lyrique. Mais vous avez cerné l’idée : il est essentiel d’être alignés sur la vision stratégique du projet, voire même de partager des points de repères personnels.
Or, la plupart des équipes de start-ups se construisent sur les compétences. Je le remarque souvent : un ingénieur, un business manager, un créatif, etc. Il y a de fortes chances pour que vous vous reconnaissiez… Pour en avoir discuté avec Karim, cette stratégie me semble présenter un écueil important (navré pour vous) : si cela permet d’aller vite au démarrage, cela devient limitant à long terme. Il confirme d’ailleurs qu’il est « toujours possible de combler un manque en compétences: on recrute, on fait appel à un prestataire ou un partenariat, et surtout, on apprend ! » A l’inverse, les valeurs, elles, portent le projet de la société. « Elles constituent l’axe de pivot inébranlable autour duquel évolue la start-up au fil des années. »
Thérapie de couple pour entrepreneurs ? (ce titre n’est pas une blague)
Concrètement, comment vous y prendre ? « Avant d’associer quelqu’un à son projet, il faut être très clair, ne pas hésiter à aborder le sujet… et ne surtout pas le rendre tabou ! », me conseille Karim.
En posant par exemple les questions suivantes. Entrainez-vous dès aujourd’hui car je vous défie d’y répondre du tac-au-tac… : Quelle est ta stratégie personnelle d’ici 5 ou 10 ans ? En quoi notre projet entrepreneurial te permettra d’atteindre tes objectifs ? Quelle est pour toi l’importance de la valeur famille ? Et de la valeur travail ? L’entrepreneuriat est-il pour toi un moyen d’accéder à autre chose (capital, réseau…) ? Où se situe ton épanouissement personnel ? Etc. Pas de jugement de valeurs : simplement une validation de la compatibilité des associés, et une identification des points sensibles à surveiller.
Et une fois l’associé à bord, il faut continuer à échanger sur le sujet.
Karim me confie : « Certains associés participent régulièrement à des séances de thérapies de couples… car les thérapies pour associés, ça n’existe pas encore ! » Bien sûr, cela m’a fait sourire. Mais j’ai bien compris la pertinence de la démarche : s’assurer qu’il n’y a pas de déconnexion entre les valeurs de l’un et de l’autre, que la vision du projet reste la même… et permettre d’aborder, si besoin, les questions taboues (faut-il considérer l’entrée ou la sortie d’un associé ? et dans quelles conditions et avec quel timing ? comment partager avec l’équipe cette étape, sans dramatiser).
Karim me le confirme : « ce « couple » d’associés fonctionne très bien ».
Alors, si c’était à refaire ? Sans revendiquer avoir « LA » solution, Karim tire un enseignement constructif de son expérience : « Clairement, j’irais chercher des associés en phase avec mes valeurs, car être seul à porter une start-up est un défi de chaque instant… Mais je prendrai cette étape bien plus au sérieux et mettrai en place les conditions d’une communication régulière. »
Voilà de quoi vous inspirer en termes de… « valeur ajoutée » !
Par Christophe Breuillet
Directeur de Vitagora et CEO d'AcceleRise, Christophe est notre chef d'orchestre ! Ses domaines d’expertise : le développement d’entreprise, la croissance à l’international, les stratégies d’influence… en bref, le « business », sous tous ces angles. Contactez-moi : christophe.breuillet@vitagora.com