Révolutionner l’expérience client : pour de nombreuses start-ups de la FoodTech, c’est un moyen de se distinguer de la concurrence, notamment des grands comptes ancrés dans le « brick and mortar » et souvent frileux de remettre en cause leur fonctionnement éprouvé.
Et pourtant ! Certaines multinationales renouvellent leurs modèles, bousculées pour le secteur de la distribution par Amazon notamment… On a testé pour vous l’hypermarché connecté de Carrefour Villiers-en-Bière ! Ambiance de marché, environnement cocooning et écrans LED. Quand un grand compte révolutionne l’expérience client, ça donne quoi ?
Bousculer la distribution traditionnelle
« Après un an de travaux, Carrefour dévoile à Villiers-en-Bière un hyper connecté » titrait le magazine LSA en janvier. A l’heure où les études démontrent que les consommateurs, même de jeunes générations, recherchent la proximité avant la connectivité, ce magasin emblématique de la grande distribution allie les deux dans une expérience client repensée.
Car repenser l’expérience client représente ici pour Carrefour une stratégie de choix face à la concurrence grandissante, et innovante, d’Amazon Go. Ces épiceries « in real life » signées par le géant Amazon bousculent la règle du jeu : pas de caisse, pas de file d’attente… une expérience d’achats basée sur les technologies du numérique et de la data, et également dotée d’une dimension « commerce de proximité ».
Mais avec ses 24 000 m² et 170 millions d’€ de chiffre d’affaires chaque année, a priori, peu de chances pour que cet hypermarché Carrefour situé au Sud de Paris en Seine-et-Marne, le plus grand hypermarché de France, fasse véritablement naitre une expérience client personnalisée et conviviale…
Ramener de la proximité
Pour autant, après plus d’un an de travaux, Marine, ingénieure projets à Vitagora basée à Melun, en est devenue une véritable habituée. En plus de son regard d’ingénieure agroalimentaire dotée d’une sensibilité FoodTech, Marine entre dans la catégorie de consommateurs « Millennials ». Bientôt trentenaire, amatrice de cuisine faite-maison, ses choix alimentaires sont guidés par une recherche de praticité, de gain de temps, mais également de plaisir de manger. Le tout, smartphone à la main, bien entendu. « Avant les travaux, je privilégiais les épiceries de proximité ou le drive pour ne pas perdre de temps. Cet hypermarché représente 24 000 m² en surface totale : c’est immense ! Depuis les travaux, je le reconnais sans détour : c’est devenu le lieu de vente que je favorise. »
Ce qui répond le plus à ses attentes de consommatrice, c’est la carte de la convivialité, clairement s’inspirant du modèle des commerces de proximité.
« Pour chaque type d’aliments du rayon frais – traiteur italien, pâtisserie, fromages à la coupe, etc. – il y a un stand de démonstration, de dégustation et de présentation. On se croirait dans des halles de marché. L’humain et l’échange sont ramenés au centre de l’expérience. »
A cela s’ajoute le jeu de la transparence : « Sur le stand pâtisserie, les employés assemblent devant les yeux des clients les produits en vente. Et sur le stand boulangerie, on peut voir des fours de démonstration, pour constater que le pain est bel et bien cuit sur place. Tout cela était déjà réalisé sur site... Mais le faire devant les clients, c’est une façon de les rassurer. Et cela participe à l’humanisation de cet immense espace.»
Une expérience ludique et récréative
Ce qui fonctionne également pour séduire Marine (et probablement tous les autres aussi) ? « Ils ont vraiment réussi à transformer l’expérience « corvée » des courses en expérience « loisirs ». On se rend dans l’hyper pour passer un moment de flânerie. »
Marine note bien sûr le travail réalisé sur le choix des matériaux et des couleurs, tendances et cocooning. Mais également un travail plus global : chaque rayon est pensé et aménagé comme un magasin spécialisé. Ambiance bibliothèque côté livres, torréfacteur côté cafés, caves côté vins.
Résultat : « mes achats ont augmenté », reconnait Marine.
« Un frein reste majeur cependant », ajoute-t-elle : « il faut du temps pour s’y promener. En premier lieu, la surface est immense et simplement traverser les rayons prend du temps. D’autre part, pour tirer pleinement bénéfice de cette expérience de flânerie, il faut accepter de perdre son temps à regarder les démonstrations, les ateliers, à se balader dans les rayons. Un client pressé n’en tirera certainement pas la même expérience. »
Côté connecté, des progrès restent à faire
Et côté FoodTech ? Sur ces aspects, pourtant mis en avant par l’enseigne, Marine est plus critique. « Cet hypermarché est censé être connecté. Pour ma part, je ne le perçois pas. Tout ce que je constate, c’est un réseau wifi gratuit, et des écrans de promotion ou de signalétique. Rien de bien innovant à mes yeux. Avec mon regard baignant dans la FoodTech, je m’attendais à des outils plus poussés tirant intérêt des technologies connectées : comptes-clients sur l’application, remontée de données via le wifi, géolocalisation… les fondations technologiques semblent là pour permettre des publicités ciblées, des écrans évolutifs personnalisés, des push individuels. Pour le moment, il n’y a rien de tout cela. »
Peut-être faudra-t-il attendre que le projet StoreConnect, labellisé par Vitagora, apporte une dimension plus palpable au magasin connecté ?
« Faut-il s’attendre à ce que les aspects connectés évoluent dans les mois qui viennent ? Peut-être. Mais pour moi, l’innovation de cet hypermarché est véritablement l’optimisation de l’expérience client. On s’y sent bien, malgré ses 24 000 m². C’est un moment récréatif. En innovant ainsi, ils ont su me ramener, moi cliente du drive, en magasin : c’est une vraie réussite. »
Par Clémence Bouvel
Chargée de communication, Clémence capte les tendances à ne pas manquer sur ses outils de veille et les retranscrit via le blog de Vitagora, des lettres de tendances, les réseaux sociaux, etc.