« Il ne faut pas viser la polyvalence sur le long terme, mais plutôt rechercher sans cesse plus spécialiste que soi. » Jean-Gabriel Levon, cofondateur de la start-up Ynsect, met en garde les entrepreneurs sur leur volonté de tout gérer. Perdre son poste pour aller plus loin dans son développement : et si c’était la clé de votre réussite ? Voici les 4 conseils de Jean-Gabriel pour vous débarrasser de la polyvalence, cet ennemi juré.

 

 

Ynsect : l’industrie des insectes

 

Dans un contexte où la demande en protéines ne cesse de croitre, la start-up Ynsect a été fondée en 2011 par 4 co-fondateurs, pour produire des matières premières à base d’insectes répondant aux meilleurs standards de la filière de la nutrition animale. La mission d’Ynsect est de faire de l’insecte une matière première incontournable de l’alimentation des animaux d’élevage, ou de compagnie.  
 
L’ambition des co-fondateurs : structurer une nouvelle filière industrielle consacrée à la transformation des insectes. Une ambition forte, qui a permis à la start-up de lever plus de 35 millions d’euros en 5 ans (pas maaaal !), et de se lancer dans l’industrialisation grâce à l’ouverture de leur usine toute belle, toute neuve, dans le Jura. Des « Tenebrio Molitor » au milieu des vaches laitières, vous en rêviez ? Ynsect l’a fait. 
 
 

Accepter la polyvalence au démarrage uniquement

 
Et j’insiste : uniquement !
 
Jean-Gabriel Levon, l’un des co-fondateurs, n’en est pas à sa première expérience de l’entrepreneuriat. « Avant Ynsect, je m’étais déjà lancé dans d’autres projets de start-ups… Mais ce furent tous des échecs. A posteriori,  je pense qu’aucun n’a fonctionné car j’étais seul. »
 
S’il reconnait qu’il est difficile de faire sans polyvalence au début d’une aventure start-up, il affirme : « la polyvalence ne doit surtout pas s’installer ! Conserver une fonction « multi-casquettes », c’est se fermer aux spécialistes, aux experts sur tel ou tel métier. Pour réussir, on ne peut pas être seul. » 
 
Pour Ynsect, dès le démarrage, ils étaient 4. Dont 3 issus de leur bande de copains de lycée, « un très bon réservoir à co-fondateurs » selon Jean-Gabriel : « comme les spécialisations viennent après, nous avions tous les 3 des compétences différentes. Pour le 4e co-fondateur, l’un de nous connaissait le parfait complément : un profil d’ingénieur agronome. »
 
Sa logique : « Perdre son poste. Le laisser à meilleur que soi. C’est le gage du développement de sa start-up. »
 
 

2. Vous concentrer sur votre rôle : fondateur = défricheur

 
En 5 ans, Jean-Gabriel a endossé plusieurs fonctions techniques : chef des opérations, directeur d’usine… et s’apprête à en prendre une nouvelle.
 
« Je dois défricher nos sujets, nos problématiques, nos projets. Je débroussaille, je taille le projet au milieu des incertitudes. Une fois qu’un projet est lancé, je le confie à plus compétent que moi. »
 
Ingénieur de formation, Jean-Gabriel n’avait jamais construit d’usines jusque-là. « C’était impensable que je pilote seul l’industrialisation d’Ynsect ! J’avais besoin de compétences et de personnes expérimentées sur ce sujet pour en garantir la réussite. » 
 
Nul besoin de pécher par excès de dynamisme : vous avez de l’énergie à revendre, c’est louable… mais sur certains sujets, il faut bien l’avouer – l’expérience est indispensable. 
 
 

3. Vous donner les moyens de recruter

 
Jean-Gabriel se souvient : « lorsque nous avons recruté notre comité de direction, une personne compétente sur les aspects d’industrialisation a débloqué en 2 jours seulement ce sur quoi nous bloquions depuis 3 mois. »
 
Le calcul est vite fait : « ça coûte moins cher de recruter que d’accumuler des échecs et de perdre du temps. Il faut se donner les moyens de recruter. »
 
Petit bonus : être une start-up joue en votre faveur pour intéresser des profils expérimentés ! Par exemple, des cadres qui cumulent 15 à 20 ans d’expérience sur des postes similaires et qui ont atteint une certaine routine. « Chez nous, il y a tout à faire, c’est un vrai défi qui capte l’intérêt de profils expérimentés. »
 
 

4. En toute simplicité… restez vous-même.

 
« Avec notre rythme d’évolution, j’ai arrêté de mettre un titre sur ma carte de visite… Mon record sur le même poste est de 18 mois : c’est pas mal, quand même ! », reconnait Jean-Gabriel en souriant. « Mais ce n’est pas pertinent d’écrire noir sur blanc un titre qui évolue au gré du développement de l’entreprise. »
 
Ce qu’il préconise aux fondateurs comme lui : ne pas s’enfermer dans son titre. « Attention, ça ne veut pas dire qu’il n’y pas de missions ou qu’on laisse le chaos s’installer ! » Non, l’intérêt, c’est de penser « efficacité », « souplesse », « adaptation ». 
 
« Pour ma part, j’ai toujours préféré être sur le terrain. Je laisse aux autres les aspects qui me passionnent moins. Ils seront meilleurs que moi !  Je reste moi-même. C’est le meilleur moyen pour accepter de laisser mon poste à des experts métiers, et pour faire progresser l’entreprise. »
 
 
Par Claire M.
 
 
 
Start-up manager pour AcceleRise, Claire est familière du monde de l’entrepreneuriat : elle a passé plus de 4 ans en tant que chargée d’affaires au sein d’un incubateur bourguignon de start-ups et centre européen des entreprises et d’innovation. Sa mission au sein d'AcceleRise : accompagner les start-ups au quotidien, les challenger, et leur apporter une aide et une écoute à la fois humaine et motivante.. Contactez Claire : claire.maugras@vitagora.com